La voix de Graine
Aujourd’hui, première marche de préparation pour mon escapade sur le chemin de Compostelle prévue en septembre.
Je pars vers 14 h. J’avance droit vers la montagne noire, vers le sud. « El camino de la vida ». Le chemin pour moi, c’est bien ça, un chemin à l’image de la vie, avec ses moments difficiles et ses moments de bonheur intense. Marcher, seule, avancer droit devant. La solitude de la marche est exigeante, déroutante. Dans la tête, les pensées défilent. Parfois, elles portent, parfois, elles plombent. Il y a les paysages, la météo, les rencontres…
Côté météo, le temps est idéal. Il ne fait ni trop chaud, ni trop froid. Un peu de vent et d’air, pas de pluie. Je croise des marcheurs, des cyclotouristes avec leurs sacoches pleines, des cyclistes. Un bonjour échangé, rien de plus.
Le départ est difficile. Je résiste à l’envie de regarder sans arrêt mon portable. Le chemin du train, le chemin des droits de l’homme sur lequel je marche est balisé. Il y a des bornes tous les kilomètres.
Je croise un écureuil, puis un autre lorsque je fais ma pause au bout de 12 km, avant de faire demi-tour. Je profite de la pause pour m’excuser auprès de la secrétaire de mon association jacquaire. Ce matin, j’avais prévu une réunion sur le site, mais au vu des retours négatifs, je ne savais plus quoi faire. La secrétaire s’est retrouvée seule face à la caméra, à essayer de m’appeler sans succès puisque le portable ne passe pas. Pas cool, je lui devais des excuses.
Respirer, regarder les champs de part et d’autre, du blé, du tournesol qui n’a pas encore ses fleurs, du maïs, de l’ail. Repérer les arbres et les arbustes sur le bord du chemin: chênes, noyers, robiniers, genêts, noisetiers, cerisiers, lilas, frênes…Reprendre contact avec la nature m’apaise et me recentre. Je n’ai plus besoin de mon portable pour avancer. Juste accepter l’instant présent, le vivre et attendre l’instant suivant. La marche me réconcilie avec l’éphémère et l’impermanence des choses.
Je rentre vannée, avec des ampoules, mais heureuse d’avoir fait le 1er pas pour me mettre en bonne condition physique pour partir. Mon mari vient à ma rencontre à vélo. Ce soir, c’est lui qui prépare la table.
La voix de Lilie
Chassé-croisé Graine. Tu es partie, je rentre. Journée transhumance, le terme est bien choisi.
La matinée démarre de façon totalement inattendue. Les brebis ont disparu de l’enclos. Après avoir cherché dans tous les recoins du terrain, on les retrouve sous le préau où ma cousine gare sa voiture. Notre présence les effraie. Elles sont toutes jeunes et arrivées d’hier, elles ne nous connaissent pas. Nous essayons de les ramener vers le terrain, elles dévorent les fleurs du jardin, le paillasson devant la porte. Elles essaient de rentrer dans la maison, elles devaient avoir l’habitude d’être abritées la nuit. Nous jouons les bergers pour le remettre dans leur enclos.
Après un peu de ménage, nous bouclons enfin les valises. Clap de retour. Il fait 27 degrés, soleil. La route est encombrée de camions car nous sommes en semaine. Pendant le trajet, mon père appelle pour dire qu’il est bien rentré. Maintenant nous allons voir s’il peut reprendre sa vie en main et si la maladie va se traiter ou pas. Voilà qui va conditionner le futur proche et moyen.
Après 6 heures de route et deux petits arrêts, nous arrivons à bond port. Il fait gris, le sol est mouillé, 17 degrés.
J’ai passé 3 semaines dehors, à l’air, pris mes repas sur les terrasses chez ma cousine, mon père, ma nièce, ou aux restaurants, passé du temps au soleil et au bord des piscines. C’est difficile d’être obligée de rester à l’intérieur à cause du mauvais temps. La lumière s’est éteinte. Il fait sombre dans la maison.
Je vais retrouver mes petits demain. Mes soleils suffiront ils a éclairer mon âme.