La voix de Graine

L’humidité et la grisaille ont pris le pas sur le ciel bleu…
Il fait doux. Je me sens molle.
Ce matin, lever matinal – 6 h 15 – pour aller travailler à ma coop. Je reviens fatiguée, mais apaisée. Un des seuls endroits où je me sens appartenir à une communauté debout, solidaire, active. ça me plaît. Les travaux effectués n’ont rien d’extraordinaire. Nettoyage, rangement, réception de livraison, mais je mets ma petite pierre à la construction d’un monde plus humain.
Ce soir ou demain midi, j’aurais ma petite fille et ma fille pour le repas. Peut-être la petite dormira à la maison. C’est ça le confinement. Ne pas faire de projets à long terme. Prendre l’instant qui vient et faire en sorte qu’il soit le meilleur possible. Un peu compliqué pour les courses, mais j’apprends à faire simple.
J’ai vidé mon congélateur. Je vais pouvoir le nettoyer à fond, enfin!
La nuit tombe de plus en plus tôt. C’est moins dur de rester enfermé chez soi que lorsque les jours rallongent. Demain, c’est le 11 novembre. Jour férié. Grasse matinée, Lilie, sauf si les petits sont là. Le 11 novembre, c’est une journée pour se souvenir. Elle marque la fin de la 1ère guerre mondiale. Il y en a eu des morts.
Notre guerre à nous, c’est le COVID – je mets « le » et non « la » parce que cette féminisation incessante des maladies et des catastrophes, ça commence à bien faire. Les femmes sont du côté des soignants. Elles n’aiment pas la guerre. Et se battent becs et ongles contre les maladies et les guerres.

La voix de Lilie

Que dire de cette journée ? Au levé, le chat est là. Ça veut dire que mon fils ne l’a pas sortie. Ça veut dire qu’il pleut. Ça veut dire que je veux rester au fond du lit… J’ai besoin de mobiliser toute mon énergie pour en sortir. Café, sport, travail. Pas mis le nez dehors. Ce midi j’ai vu mon fils. Nous avons commandé un couscous au restaurant du coin histoire de le faire survivre et de nous régaler aussi. Demain ce sera ma fille et les petits pour une bonne raclette. Comme dit mon fils, on fait le gras de l’hiver !

J’ai travaillé tard ce soir, certainement pour ne pas affronter le vide de cette journée. De cette soirée. Je m’abrutis de jeu au lieu de lire, de réfléchir. Mon cerveau a besoin d’une pause. Même pas envie d’écouter les infos. Relâche.

Demain c’est férié, jour pour se souvenir. De toutes ses femmes qui ont perdu un fils, un mari, leur joie de vivre, pour que les dirigeants puissent jouer aux petits soldats avec eux. De raviver la flamme de la mère du soldat inconnu. De souhaiter que plus aucun conflit ne vienne prendre nos fils. De souhaiter que s’arrête cette haine qui monte à nouveau et s’approche de nous. Comment faire comprendre que le principal dans la vie c’est de la vivre heureux…