La voix de Graine

Le vendredi, c’est la fin de la semaine de travail pour ceux qui sont en activité, et un changement de rythme aussi pour ceux qui ne travaillent plus. Le week-end, c’est le moment de faire autre chose, de voir amis, enfants, famille, de sortir quoi. Ce que nous faisons a minima depuis tellement de temps.

Pour moi aujourd’hui, c’est la poursuite du déconfinement. Première pizza à l’extérieur ce soir. Qu’est ce que c’est bon une pizza en terrasse avec un verre de vin! Et en plus, il fait beau.

La journée passe vite: ménage et courses ce matin, car nous gardons petit-fils ce week-end. Cet après-midi, je vais rendre visite à mes handicapés. Odile est triste. Le nouveau chef de service, arrivé depuis deux mois à peine, est parti. Sans vraiment dire ce qui n’allait pas pour lui. Si les résidents sont tristes, les employés sont inquiets. Le responsable de service précédent était là depuis trente ans, je crois. Ceci explique certainement cela.

Comble de malchance, pas question de sortir aujourd’hui, car il n’y a pas assez de personnel. Le protocole n’autorise pas la sortie d’un bénévole seul avec un résident. Nous sortons sur la terrasse. Il fait chaud, mais au moins nous sommes dehors. Des plantations de fraises et de tomates. Tiens, un chien. Il y a beaucoup d’humanité dans ce lieu d’accueil. Peut-être cela peut dérouter certains et plaire à d’autres. La personnalité de l’ancien responsable de service y est pour beaucoup, je pense.

Je parle à Odile de la fête des Mamans, du Louvre, de l’île St Louis où sa Maman habitait. La prochaine fois, je lui amènerais un livre d’artiste, catalogue de musée ou autre. Pour voir si elle connaît, si elle apprécie. Avant de partir, je lui demande si elle veut voir des photos. Elle m’en indique une. Avec une des employés, j’apprends que c’est sa grand-mère. Elle n’était pas commode, il paraît, dit l’employée. Elle avait son caractère. Odile jette la tête en arrière en éclatant de rire. « Dieu ne doit pas s’ennuyer avec elle », lui dis-je et elle repart à rire de plus belle! Son éclat de rire me surprend et me fait plaisir. Combien de ressources et d’émotions insoupconnées chez elle? Comme moi, comme nous!

Ce soir, j’ai rendez-vous pour un atelier d’écriture avec ma copine.

La voix de Lilie

C’est la fin d’une semaine de travail démarrée un jeudi. J’ai la tête ailleurs. Passe beaucoup de temps à appeler ma sœur, ma nièce, le médecin, mon père. La situation est complexe. La souffrance toujours là. Les médicaments de plus en plus forts calment à peine. Mal mystérieux sans véritable diagnostic. La médecine reste une science humaine, pas une science exacte. Cela me fait peur pour mon propre avenir. La souffrance est une chose que je ne veux pas subir et voir comment elle est, actuellement encore, mal gérée par le corps médical est effrayant.

J’essaie de me détendre le soir en m’abrutissant de jeux sur mon téléphone. Anesthésie du cerveau. Perte des repères.